Pandore Tomorow !

Remettre le pied dehors lorsque l’on est recherchée par la police la plus efficace que ce monde ait jamais connue ( ahah, faut que je la retienne, celle là ! ) peut faire peur … ou pas … J’ignorais moi-même si c’était la peur ou un autre sentiment qui m’étreignait l’estomac ce soir là alors que je fixais les pavés sous mes pas d’apparence calmes… Pourtant, j’aurais voulu courir et me cacher pour ne pas me faire repérer, pour ne pas me faire enfermer. Oui, peut-être de la peur, en fait…

Et pourtant, Kurt m’avait dit que j’étais méconnaissable telle qu’il m’avait maquillée et habillée… Certes mes vêtements ressemblaient plus à de simples sous-vêtements qu’à de vrai vêtements, et mon maquillage couvrait la plupart de mes traits… même mes cheveux avaient subi une certaine teinture… Et je n’aimais pas l’alliance des trois sur mon corps… Enfin, tout était pour rire que j’étais peut-être méconnaissable… Mais qu’il y avait nombre de regards qui se laissaient glisser sur mon corps… Et je n’était pas vraiment d’humeur à ce genre de situation…

Traverser l’Armansva et l’île d’Ulviana pour rejoindre le Shadow’s Hotel … Pourquoi avais-je proposé, après le départ d’Andréa, une telle expédition à Kurt Mortis ? Je me doutais qu’il trouverait un prétexte de me déguiser en pute pour nous y rendre plus « discrètement »…

D’un côté, je bouillonnais, de l’autre, cela me faisait rire… L’idée était bonne, et c’était même comme ça qu’il avait fini par m’échapper une fois lorsque j’avais essayé de le garder prisonnier au sein de l’immeuble… Aujourd’hui, si l’occasion m’était rendue, j’aurais su comment agir. Mais l’heure n’était plus aux jeux du chat et de la souris… D’ailleurs, aujourd’hui, on ne savait plus très bien qui était le chat ou la souris entre nous deux…

Ah ! Pour vous expliquer un peu… Après le départ de mon cher frère, je me suis rendue compte qu’il me manquait un élément essentiel dans mes données : des dossiers que j’avais caché dans mon bureau, au Shadow’s Hotel. Et si Kurt ne me les avait pas rapporté la dernière fois, c’était parce qu’ils n’étaient pas cachés dans le coffre… Mais dans un endroit plus secret encore qu’il me faudrait ouvrir moi-même. Je n’y avais plus pensé et, il faut dire, que si Andréa n’était pas reparu, je les aurais sans doute laissé là… Mais le retour de mon frère dans l’équation changeait quelque peu la donne… Donc je décidai d’aller les récupérer le plus vite possible avant que quelqu’un ne tombe dessus…

« N’empêche,… Ca fait longtemps que tu te prostitue comme ça ? »

Tss… Pathétique… Monroe aurait quand même pu garder la sécurité intacte…
Ou bien était-elle aussi décadente même lorsque je résidais ici ?…
Ah, il fallait peut-être que je refasse parler de moi au sein de l’Apo ?… Non… Attendre encore un peu que les choses se tassent… Récupérer les documents et partir… C’était mieux.

Le tout en ayant l’air d’une prostituée… La vie est difficile quand même…

Pendant plus d’une semaine, j’avais tout oublié… Messia, l’Apocaliptic Blow, ma vie d’avant… J’avais remplacé ces pensées par Kurt, et un soupçon de regret pour Wesley, et nouvellement mon cher frère… Jamais un homme n’avait autant transposé mes pensées ! Et tandis que l’ascenseur atteignait péniblement le dernier étage du luxueux hôtel, je me posais la question… Pourquoi ?

Ding !

La réponse attendra.
Devant nous, les trois charmantes portes et un couloir désert… Faut vraiment que je parle à mon collègue un de ces quatre, moi.
Et je m’avance devant la porte de mon bureau… Fermée bien sûr… Mais suffit d’avoir le code d’accès pour entrer…

Et hop, en deux temps trois mouvements, la porte qui se referme derrière nous… Et la lumière de l’appartement – bureau allumée…

« Bien… Vraiment besoin de tout cet attirail pour si peu ?… »

Regard critique à la vue du déguisement de Mortis… Je retiens toujours difficilement un éclat de rire, j’avoue… Et pour « cacher » ma mine amusée, je me diriges vers le bureau qui traîne dans un coin, avec pas mal de papier éparpillés dessus… des trucs sans importance, mais c’est les tiroirs que je commence à fouiller à la recherche d’une clé… Où a-t-elle bien pu passé ?

« Au fait, Kurt… T’es allé faire quoi lorsqu’Andréa a débarqué et que tu t’es barré sans même emporter ton manteau avec le froid glacial de l’hiver dehors ?… » Demandais-je une fois que l’homme nous eut faitES passéES le portail de sécurité de mon adoré hôtel… Ah… Les lits ici, ils sont bien mieux que les poussiéreux matelas de la maison un peu macabre de mon hôte d’infortune… Auquel je jetais un nouveau coup d’œil amusé après avoir replacé correctement une de mes mèches nouvellement rouges en place.

Tout le long du chemin, Haven n’avait cessé de se sentir mal à l’aise… voire carrément mal en écoutant les paroles de Kurt. L’homme ne s’en rendait peut-être pas compte, mais ses mots choisis avec habiletés étaient blessants … et très vrais…

Kurt avait grandi dans la rue, Haven avait grandi dans une cage dorée… Il avait dû se débrouiller tout seul, survivre aux pires choses que peut réserver la vie dans ce genre de monde tandis qu’elle avait été surprotégée, écartée de tout mal ou tout malheur et servie comme une princesse. Elle avait toujours eu l’habitude de recevoir lorsqu’elle demandait : elle appelait ? On venait. Elle pleurait ? On la consolait. A la mort de son père, elle avait toujours gardé ce rythme de vie. Elle en avait besoin. Elle ne savait pas vraiment pourquoi…


Je n’avais cessé de l’observer, sous les nuages sombres et le vent trop froid qui me donnait un léger mal de tête assez agaçant. Même déguisé(e)s, nous étions différent(e)s… La personnalité sans doute… Et c’est faux ce que vous a dit la narratrice au dessus, au fait. Il y a certaines choses que l’on ne contrôle pas. Kurt avait beau dire… oui, nous étions différents… Et malgré l’absence de reproche dans sa voix, cela s’en ressentait un peu… Il n’était pas tout à fait content que je sois d’une classe aussi haute que la mienne… Dans un sens, c’était compréhensible…

Elevée comme une princesse, mon état tendait à retrouver ce qui m’avait toujours rendue heureuse : les cadeaux, les services gratuits, la reconnaissance face à l’argent et le pouvoir… Beaucoup ne comprennent pas ce genre de choses… Je ne pouvais pas faire autrement… Je ne pouvais pas être mon frère, plus maintenant. Cette vie ne me rendrait jamais aussi heureuse que celle d’avant ! Et j’aurais beaucoup de mal à m’y faire.

Si je menais la marche, c’était pour qu’il ne voie pas mon regard. Que Kurt me blesse, peu importait. Qu’il le remarque me gênait quelque peu plus. Car je n’avais pas envie de m’expliquer. Je préférais me taire, acquiesçant simplement pour lui signifier que j’avais bien compris, regardant droit devant moi le temps de retrouver contenance.

Mais il n’en avait pas fini…

« …je ne tient pas a ce que tu prennes dans la baston Haven, je n'aurait pas l'air sérieux si celle que je tente de protégée se fait prendre par quatre gardes du corps un brin malsain avant d'être livrée au autorité… »

Je ravale difficilement ma salive en lui jetant un coup d’œil. J’avais réussi à prendre sur moi pour cacher le stresse que la sortie faisait naître en moi. J’avais peur ! Peur de me faire prendre… Dans le sens normal du terme… Et caché aussi… J’aurais préféré être cachée dans la « chaude et accueillante » maison de Kurt plutôt que d’être là à fouiller un tiroir à la recherche d’une stupide clé pour ouvrir un stupide coffre caché dans un de ces stupides murs ! Mais voilà, j’en avais besoin, et Kurt ne serait sans doute pas déçu de ce qu’allait nous ramener cette petite expédition…

Néanmoins, cela me toucha qu’il n’aie pas envie que je me fasse violée et enfermée… Même si c’était simplement par pure jalousie possessive. J’étais rassurée de sa présence et du fait que je tenais un tout petit peu de place dans son esprit pour qu’il n’ait pas envie de m’en chasser tout de suite…

"Tu sait que tu est très belle la dedans? J'adore vraiment, dommage que je te préfère sans rien, ton corps est trop magnifique pour avoir des vêtements pour le cacher…"

Un maigre sourire était né sur mes lèvres à ce moment là… J’ignorais dans quel but il disait cela, mais cela calma un peu ma peur, rendant la situation un peu moins lourde. Après, nous étions arrivés à l’appartement, et je me revois encore très bien fouiller le tiroir en posant la question fatidique de cette soirée. Je l’avais posée sans trop savoir pourquoi, et je venais de trouver ce que je cherchais… Mais je continuais de faire comme si j’étais occupée, pour éviter de relever mon regard vers lui lorsqu’il me répondit… une franche vérité… Une vérité qui me noua l’estomac. Qu’avais-je, bon sang ???

Mais je relevais les yeux rapidement en notant la honte qui résidait dans sa voix… Nous n’étions donc ni l’un ni l’autre dans nos états normaux ! Le déguisement peut-être ? Oh oui cela devait être ça ! Il s’était rapproché… En fait, il était déjà collé à moi… Je serai la clé plus fort dans mon poing, à m’en ouvrir les paumes de mes ongles, fermant les yeux en sentant le corps chaud et sensuel du gigolo contre mon dos. C’était agréable et cela me détendit après m’avoir tendue à l’extrême, si bien que si Kurt ne l’avait pas remarqué, c’était qu’il était déjà en plein discours au creux de mon oreille…

Vous vous souvenez lorsque je vous avais dit que ses mots m’avaient fait un certain mal ? Hé bien ceux-là me firent de la peine.

"…Tu sait Haven, je sait que lorsque tu aura a nouveau la gloire, l'argent, la renommée, tu repartira car tu n'aura plus besoin de moi…Je sait pas pourquoi, peut être que j'ai pas confiance en l'espèce humaine mais…"

Un soupir qui malgré moi quitta mes poumons à cet instant… Je l’écoutais, sans pouvoir parler, les yeux clos et la gorge nouée. C’était étrange d’avoir une telle discussion dans un tel endroit… sur un tel sujet… Et je buvais ses paroles… Comme la dernière fois… Comme lorsque Kurt s’adressait à moi de cette façon… Comme une épingle en plein cœur !

Je ne savais plus comment réagir… Alors je le laissais faire… Tandis que mon esprit réfléchissait lentement… Mais il cessa totalement de fonctionner lorsque j’eut les yeux de Mortis en face des miens et ses lèvres sur les siennes, avec ses mains dans ma nuque et dans mes cheveux. Et le temps s’arrêta alors…

Jusqu’à ce que la réalité revienne…

Sentir Kurt m’embrasser de la sorte était étrange. Chaud et réconfortant… Il n’y avait pas d’amour là dedans… A toute évidence, nous étions tous les deux hermétiques à ce sentiment en particulier… Mais cela dépassait la simple affection… Passion, c’était peut-être bien le mot qui convenait…

"…Bon…tu trouve ces clés?...si je reste encore longtemps habillé comme ça, je déchire mes fringues et les tiens en prime…"

Je reprend lentement mon souffle et le fixe, chassant une mèche de mon regard. J’aurais aimé reculer d’un pas, mais derrière moi se dresse le bureau, m’empêchant tout mouvement. Alors je fixe ses yeux, cerclés de rouge… Etait-ce possible de faire passer l’envie de drogue à Kurt ? J’en doutais fortement… Mais cela lui donnerait un tellement plus beau regard…

Soupir, soupir…

« Kurt… Cela fait dix minutes que je l’ai trouvée, cette clé… »

Je secoue la tête, chassant les mots inutiles, chassant les pensées inutiles…

« Tu as raison… Nous ne somme pas du même monde. Inutile d’en débattre plus sur ce sujet, c’est une réalité qui n’est plus à prouver… Néanmoins, lorsque tu dis que je reviendrais un jour riche et célèbre… N’oublierais-tu pas dans ton équation que j’ai tiré sur un flic ? Que toute la police de Gallisco me tomberait dessus si jamais je réapparaissais ? Que ma société est sur la paille ?… Et puis, non, Kurt ! »

Cela m’énervait… Je m’écartais de lui un peu abruptement, m’avançant jusqu’au milieu de la pièce, fixant rageusement le divan comme si c’était sur lui que je déversais toute ma rage et ma peur accumulée depuis notre départ de la planque et non sur Mortis…

« Aies confiance en moi ou non, mais ne croit pas que je te lâcherais au premier retournement de situation en ma faveur qui pourrait te mettre hors course ! J’ai peut-être l’habitude de coucher avec n’importe qui pour le physique, je ne suis peut-être qu’une petite fille de riche qui ne connaît rien à ton monde, mais… »

Mais quoi ?… Mes deux perles grises se fixèrent sur Kurt Mortis alors que je me retournais lentement pour observer sa réaction. Mais… ? « Je t’apprécie trop pour te renvoyer comme un vieux chien dont on n’a plus besoin ? » Ou quelque chose de plus … frappant ? Mon esprit tergiversait trop longtemps déjà pour que cela puisse être à nouveau sincère. Alors je ne dis rien de plus et allait finalement ouvrir le coffre avec la clé et mon empreinte rétinienne… Pour y déloger un dossier et … quelques paquets reliés de billets verts…

A vrai dire, je n’étais pas venue pour l’argent… Je n’aurais pas pris le risque pour si peu. J’étais certes venue pour de simples bouts de papier (un disque, à la rigueur, planqué dans une chemise en papier dans le dossier que je tenais en mains) mais je n’étais pas venue pour rien, quoi qu’il en croie… Car son regard me montrait bien un certain reproche lorsque ses yeux étaient tombés sur les liasses de billets verts…

Je me retournais, refermant le coffre fort qui disparu à nouveau dans le mur alors. Et je l’observais tandis que ses pas diablement félins, diablement sexy, se rapprochaient de moi… Mes yeux qui se ferment un instant, j’inspire… Combien d’hommes avais-je sauté comme il le dit si bien « juste parce qu’ils étaient mignons » dans cette pièce ? Combien dans mon autre lit dans une villa qui n’était certainement déjà plus à moi à ce jour ? Et combien dans leur propre appartement, entre deux rendez-vous, ou bien même alors que leur femme était sur le point de rentrer ?... Et j’ouvris les yeux, fixant cet homme qui n’avait l’air de rien comme ça mais qui était pourtant … Kurt Mortis…

Tout était dans le nom…

Il n’était même plus possible de l’expliquer…

"...Mais la parole n'est pas nécessaire, nous somme des individus d'actions, laissons voir ce qui se passera...En attendant..."

Je le fixe, mes yeux dans les siens… Cette drogue Kurt… Transforme tes si beaux yeux en un océan déchaîné où traîne de lents serpents de sang… Et je n’ai pas le temps de les admirer plus longtemps que je sens déjà tes doigts m’arracher les quelques économies que j’ai pu garder ici…

Mais j’en ai assez que tu aies toujours raison… Soupir tandis que je te regarde… Parle encore…

"...Hum, toi, quand on sera rentré, il me faudra une nuit complète de plaisir pour oublier que tu risque ta vie et la mienne pour de simples bouts de papiers!"

Je ne vais guère débattre là-dessus, je n’étais pas capable d’essayer de lui faire comprendre ce que de simples bouts de papiers pouvaient compter dans ce monde, dans les hautes sphères de Gallisco. Je souris malgré la situation, mes yeux brillants enfin de cette malice qui m’avait quitté depuis cette dernier fois où lui et moi traînions nus sur le sol de sa charmante demeure…

« Avec plaisir » Que je murmure alors que son bras s’enroule autour de mes reins, et que sa main droite glisse sur mon épaule. Quelques secondes plus tard, il s’écarte, ne me laissant le goût de ses lèvres que par ce qu’il en avait laissé sur sa cigarette qu’il m’abandonnait alors. Hm, la douce sensation de la nicotine … j’aurais préféré ses lèvres mais c’est pas mal non plus… Ca me détend un peu plus.

Mon regard, de nouveau, se perdit sur ses courbes, mises en valeur par les vêtements de femme qu’il portait. Bizarre… Je n’arrivais pas à m’y faire… Lorsque je le voyais, il portait toujours, dans ma tête, ce long manteau noir par-dessus son torse nu et son chapeau haut-de-forme. J’avais beau chassé cette vision de ma tête, elle revenait se glisser entre lui et ma rétine…

Et puis… Je sentis ce délicieux frisson me chatouiller les muscles. Instinctivement, je m’avançais d’un pas vers lui, me retenant un instant… J’avais une furieuse envie de… Mais non ! Pas ici… Pas maintenant, alors qu’à l’autre bout la rue, du quartier, de Gallisco… On me croyait morte, ou pas… On me recherchait, ou bien on imaginait seulement comment on allait bien finir par me sceller à un lit pour profiter de ce que j’avais offert à nombre d’hommes… Pour me mater…

Mais j’avais une furieuse peur de ça… Entre mourir et être enfermée pour servir de chienne à tout faire, je préférais encore que Kurt me tue ici, maintenant, ce soir, pour répandre mon sang sur le tapis couleur saumon… Hm… Le saumon… Goûterais-je à nouveau à ce délice charnel, au sens premier du terme pour une fois ?

Et puis, l’envie se fit plus forte… Une de mes inspirations se bloqua dans ma cage thoracique… Ah… Il voulait vraiment jouer à ça… Faire furieusement « l’amour » ici et maintenant ?... Pourquoi on appelait ça « l’amour », d’abord ? C’était ridicule… Mais soit… Moi aussi j’avais un don… Et l’on allait découvrir ce soir lequel de nous deux était le plus résistant à l’autre que… l’autre, justement…

« Je croyais que tu voulais rentrer avant de commencer cette « nuit complète de plaisir »… Tu sais ce que nous risquons à nous attarder ici, ma chère Kurt ?... »

Mais on dit que l’excitation est encore plus forte dans ce genre de situation…

Et si on testait ?...

Je me rapprochais de lui, lentement, venant déposer le dossier bien fourni par-dessus les liasses de billets… Me penchant au dessus de lui en plantant mon regard dans le sien, en plaquant vivement mes lèvres sur les siennes. Pas le même baiser sensuel qu’il m’avait offert quelques secondes plus tôt… Non, un baiser plus langoureux, et plus … hm… pervers ?...

Crac… J’ai toujours trouvé que ce mot puait les emmerdes… C’est un peu le bruit d’une porte qui s’écroule sous les coups des policiers lorsqu’ils envahissent une planque… Le bruit que peut faire une claque bien placée… Le bruit d’un téléphone qui se brise sur un mur… Le bruit de deux gardiens découvrant que la porte du bureau du boss sensé être mort ou disparu a été « forcée »… D’ailleurs… Kurt l’a senti aussi… Mes yeux, une seconde, s’arrête sur la taille de la lame qu’il sort de son porte jartelle… Comme a-t-il réussi à marcher avec un truc pareil contre la cuisse ?? Kurt m’étonnera toujours… Et pourtant, quand je le vois se placer tranquillement à gauche de la porte, j’ai un frisson qui ne présage rien de bon. Mon réflexe à moi, c’est de poser mes pieds nus au sol et de rassembler le dossier et les billets épars et de les fourrer dans un sac…

Mais mon geste sera interrompu l’espace d’une seconde lorsque la porte s’ouvre. Je me fige dans mon mouvement, croisant du regard les deux gorilles en costard, dont un aux petits yeux porcins qui me matte avec perversité, envie, culot, et pleine satisfaction… Enfin, tout cela avant qu’il ne se reçoive le couteau de Kurt en pleine pomme d’adam. Après tout ce que l’on pourra lire avant qu’il ne s’écroule c’est : douleur, douleur, mort…

L’ordre que m’adresse Mortis ensuite est sans appel. Je finis ce que je suis en train de faire, et récupère avec une rapidité que je ne me connaissais pas, mes vêtements. J’enfile mes sous-vêtements noirs avant de me retourner pour voir Kurt, aux prises avec le second gorille. Oh mon dieu ! …

C’était vrai que je n’avais jamais trouvé que Kurt était très musclé, mais là… Cela en devenait presque ridicule ! Ce mec était trois à quatre fois plus fort que lui, et il pissait déjà le sang après trois coups de poings en plein visage. Avisant le revolver non loin, j’allais amorcer mon mouvement d’aide et de sauvetage digne d’une héroïne de série télé ( ce que je ne suis manifestement pas… j’suis plutôt genre anti-héroïne, je crois ) lorsque un nouveau cri m’arrêta…

Et je faillis vomir en voyant la scène… Kurt venait de lui arracher tout simplement les… hé bien… Ce qui fait d’un homme, un homme…Je reste figée, au bord de la nausée, la peur et le dégoût me vrillant l’estomac. Ma jupe dans une main, c’est avec effroi que j’observe la main du gigolo fourrer ce qu’elle contient dans la bouche de celui qui nous voulait du mal avant qu’il ne saisisse le pistolet pour achever le mec…

Et moi je me retourne, continuant de m’habiller, n’ayant guère envie d’en voir plus, notant tout de même la phrase que prononcera mon « amant » avant de tuer le garde … Assez vraie…

Une fois le coup de feu tiré, je me retourne, pour croiser son regard. Tout tremblant, Kurt me lançait un regard suppliant… Je ne vais pas vous mentir, j’étais prête à fondre en larmes. Et alors qu’il s’approche de moi de son pas chancelant, je me précipite sur lui, sans réfléchir, l’aidant, et venant éponger le sang de son visage avec douceur à l’aide du premier tissu que je trouve, qui se trouve être mon t-shirt ( si on peut appeler cette chose comme cela ). Avec une tendresse et une douceur qui ne collent absolument pas à la situation, je ne voulais qu’une chose … Retrouver cette beauté rassurante chez lui…

En vain… Les mots qui sortirent de ses lèvres et l’expression de ses yeux me glacèrent le sang. Je maintins néanmoins le tissu sur son cou, le fixant comme s’il me demandait l’impossible. Et n’était-ce pas ce qu’il me demandait ? Non… C’était tout à fait possible de fuir, et une partie de moi me disait qu’il avait totalement raison. Seuls, chacun de nous avait une chance de s’en sortir, à des prix différents. Mais ensemble, nous étions bons pour la peine capitale.

Je reculais, secouant la tête comme pour lui dire que je ne le ferais pas, tout en récupérant pourtant le sac et regardait en direction de la porte pour trouver déjà quel chemin serait le plus sûr à emprunter pour sortir entre les deux cadavres…

Mais je n’en avais aucune envie…
Laisser Kurt Mortis ici revenait à le laisser entre les mains de l’Âme de Gallisco…
Et j’avais une petite idée de quoi elle était capable…
Non que je n’avais pas confiance en lui… C’était le meilleur gardien de secret que je connaissais… Mais je ne voulais pas rentrer seule… Je ne voulais pas le laisser seul… Pas dormir seule en me demandant s’il était encore vivant ou bien déjà aussi froid que la pierre, aussi pâle que mort… C’était une angoisse que j’avais peur de devoir supporter car j’ignorais totalement si j’en étais capable… Mais c’était ce que j’allais devoir affronter… Je ne le compris réellement qu’en croisant son regard, juste avant qu’il ne pose sa main sur ma joue... Et me murmure une phrase à la fois très stupide et très convaincante…

Que répondre ? Le silence et partir ? Non… J’avais des choses à lui dire… Beaucoup… Mais le temps pressait si je voulais réellement sauver ma peau à moi et la sienne à lui aussi…

« Kurt… Fait gaffe à toi… Et revient le plus tôt possible… Je t’attendrais… A la planque… »

Et là, malgré le sang qui lui recouvre le visage, je ne peux m’empêcher d’emprunter ses lèvres pour un baiser des plus passionnels et passionnés qui durera trop longtemps… Car nous n’avions déjà plus de temps…

« Autre chose… C’est la dernière fois que je fuis comme une lâche en laissant quelqu’un derrière moi… Si tu ne reviens pas, je les tuerai tous, jusqu’au dernier… »

Et si tu reviens aussi… Mais je m’arrête avant de le dire, cette fin là… Je préfère l’autre… Et non en même temps. Ca fait trop guimauve… mais soit… plus le temps… J’enfile mes talons, l’embrasse une dernière fois…

Puis j’essuie le sang sur mon visage et avale ce goût amer de fer avant de tourner le dos à cet homme qui risque sa vie pour moi… Et je ne me retournerai plus…

Reviens Kurt…
Sinon Gallisco risquera gros…